dimanche 8 avril 2007

PRENEZ SOIN DE LUI

La directrice vient de me convoquer pour me parler de Monsieur et Madame Colas. Ils viennent d'arriver à la maison de retraite, il y a 15 jours, à la demande de Madame car elle est atteinte d'un cancer de l'estomac et se sait condamner. Sa plus grande inquiétude n'est pas de savoir s'il elle va mourir bientôt ou pas, mais le devenir de son époux. Que fera t-il ?ou sera t-il ?APRES Madame Colas a du passer un pacte avec la maladie, car une fois arrivée chez nous après une période d'accalmie, le cancer a repris de plus belle nécessitant une hospitalisation en soins palliatifs. C'est ainsi,que je me rends avec monsieur Colas dans le service qui est certes décrépi mais où il y règne une telle chaleur et un tel humanisme que les détails esthétiques passent en second plan. Madame Colas est là, dans son lit, couchée, la pompe de morphine à coté la soulage des souffrances qu'elle endure. C'est une très jolie femme, au visage doux et aux traits fins. La tristesse qui la marque s'en va immédiatement lorsqu'elle voit entrer son époux, l'amour qui les lie est évident, une immense tendresse les unit Après avoir salué Madame, je sors de la chambre pour les laisser seuls et ainsi respecter leur intimité. Je m'en vais donc dans la salle d'attente observer les 2 ou 3 guppys et scalaires qui se baladent dans le vieil aquarium recouvert d'algues vertes. Monsieur Colas vient me chercher,au bout d'un moment car sa femme souhaite me parler seul à seul. Elle émet le souhait de faire quelques pas avec moi dans le couloir. Je l'aide à enfiler sa robe de chambre, et nous avançons lentement. Elle m'a pris le bras, puis la main, pas un seul son ne sort de sa bouche. Cependant, chaque pression qu'elle exerce sur ma main exprime quelque chose et je les comprends très vite : "j'ai peur de mourir vous savez, aidez moi à protéger mon mari,"sont autant de mots tus mais dis pour autant ,alors. Nous rebroussons chemin, je la raccompagne à sa chambre et laisse le temps à son mari de lui dire au revoir. Ensuite, je viens à mon tour la saluer, je me penche sur elle, lui dépose un baiser sur la joue, en lui prenant la main et lui dis ne pas s'inquiéter, je serais présent pour elle et lui. En partant Monsieur Colas pleure, ce vieil homme bourru à l'allure de Jean Gabin,se sent perdu, il me demande si sa femme va mourir. Je n'ai pas le droit de le lui dire comme ça, je lui conseille d'en parler aux médecins et lui rappelle que nous serons là et quoi qu'il arrive il y a une place pour lui à la maison de retraite Les jours passent, je vais tous les après midi avec Monsieur Colas porter un bouquet de fleurs aux soins palliatifs, l'état de Madame s'aggravent de jours en jours son beau visage laisse place à un masque fait de souffrances et de douleurs. Personne, n'a eu le courage de dire à Monsieur Colas que sa femme allait bientôt partir et comme je le connais bien maintenant et que j'ai l'habitude de ces choses là, il était évident finalement que je devais le faire...........La semaine prochaine, c'est l'anniversaire de mariage des époux Colas, la directrice me demande comment on peut marquer le coup, sachant que c'est le dernier. Je propose,que nous allions la chercher à l'hôpital pour une sortie exceptionnelle, la dernière.....et que nous préparions un petit repas d'amoureux dans leur chambre. Les préparatifs se font le jour j, je dresse une table avec de la belle vaisselle, dépose quelques pétales de roses sur la nappe et contacte l'école d'à coté pour qu'ils viennent chanter 2 ou 3 chansons, je sais que Madame Colas aime les enfants .Sa famille est venue, aussi Madame Colas est heureuse, mais très fatiguée, elle a demandé à sa famille de nous offrir le champagne, que nous buvons à l'arrivée de notre petite chorale. Un climat d 'amour a envahie la chambre et les quelques aides soignantes présentes sortent pour pleurer tant l'émotion est grande. Quelque jours, plus tard, comme à mon habitude, je vais au soins palliatifs saluer Madame Colas et lui apporter quelques fleurs .Monsieur Colas s'enfonce dans un grand chagrin et n'a pas souhaité venir, je m'assoie prés d'elle, sur son lit et lui caresse le visage avec un gant de toilette et de l'eau de Cologne Avant de partir,je lui dis :"Madame Colas, je pars demain en vacances, mais si vous le désirez je peux venir si vous me faites demander", elle me regarde empreinte d'une immense tendresse et affection et m'embrasse la main. "Non,partez en vacances vous en avez fait beaucoup pour moi,pour nous,votre travail s'arrête là, merci pour tout".Ceux seront ces derniers mots,Madame Colas s'est éteinte dans la nuit, durant son sommeil.

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